Rabat, Dans le cadre de l’amélioration des conditions de travail au sein des entreprises marocaines, le ministère de l’Inclusion économique, de la Petite entreprise, de l’Emploi et des Compétences, en partenariat avec l’Institut national des conditions de vie au travail (INCVT), a organisé, du 20 juin au 1er juillet, douze journées régionales de sensibilisation sous le thème “Conjuguons nos efforts pour construire une culture positive de prévention des risques professionnels”. A cette occasion, le directeur de l’INCVT, Abderrazak Lalj, a accordé un entretien à la MAP, au cours duquel il a braqué les projecteurs sur la situation de la santé et de la sécurité sur les lieux du travail au Maroc, ainsi que sur les actions de l’Institut et son bilan après près de douze ans d’existence.
1 – Quel est l’état de la sécurité et de la santé sur les lieux de travail au Maroc et quels sont les défis à relever ?
R) Bien qu’elle soit difficilement quantifiable, il est indéniable qu’une prise de conscience vis-à-vis des questions de santé et de sécurité au travail est en train de s’installer dans les entreprises et à un degré moindre, peut-être, parmi les premiers concernés, à savoir les salariés eux-mêmes. A titre d’exemple, le nombre d’entreprises assujetties à la médecine du travail disposant d’un service médical du travail serait passé de 5% en 2000 à plus de 20% aujourd’hui et le nombre de salariés couverts par les services de santé au travail est également en progression. L’INCVT est appelé à jouer un rôle central dans la mise en œuvre du Programme national de santé et de sécurité au travail, adopté par le conseil du gouvernement le 04 juin 2020. En effet, l’institut est impliqué directement dans l’exécution de plus des deux tiers des actions de ce programme qui sont au nombre de 70.
Cependant, la promotion du bien-être au travail est confrontée à un certain nombre d’entraves structurelles. A ce titre, le nombre de médecins spécialistes en médecine du travail avoisine les 1.400, au moment où les besoins de l’entreprise marocaine sont estimés à au moins 3.000 médecins. Ce constat est également valable pour d’autres profils de la santé au travail comme les ingénieurs de sécurité, les ergonomes, les hygiénistes du travail et les infirmières spécialisées. La prédominance du secteur informel dans notre tissu économique constitue également une entrave à la promotion de la santé et la sécurité au travail. L’insuffisance de statistiques sur les risques professionnels et la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles n’œuvrent pas pour l’instauration d’une politique préventive efficiente. Il est à déplorer, par ailleurs, l’absence d’un fond de prévention pour financer les programmes de formation et les actions de soutien aux entreprises dans la prévention des risques professionnels.
2 – Quelles sont les actions menées par l’INCVT pour promouvoir la santé et la sécurité sur les lieux de travail ?
>R) L’INCVT a mis en exécution son plan d’action annuel au titre de l’exercice 2022 et son plan d’action triennal au titre des exercices 2022-2023-2024. Ce plan d’action porte, notamment, sur la formation à la prévention des risques professionnels des acteurs de la prévention notamment les membres des comités de sécurité et d’hygiène. Ces formations seront prodiguées dans différentes régions du Royaume et assurées par des référents formateurs sélectionnés selon des critères très précis. La communication n’est pas en reste. Son importance est centrale en matière de promotion des conditions de travail. À cet égard, l’INCVT s’est attelé à élaborer un plan de communication sur un horizon temporel triennal 2022-2024 autour de la santé et la sécurité au travail. Il a pour objectifs d’accompagner l’Institut dans l’orientation globale des différentes stratégies de communication, de définir les plans d’actions communicationnels qui en découlent et de contribuer à accompagner l’Institut dans le déploiement de ses objectifs et prestations. Dans le domaine de la recherche scientifique, l’INCVT est en train de mettre en place une base de données relative à la recherche scientifique en prévention des risques professionnels et aux institutions de recherche en santé et sécurité au travail au Maroc et ce, afin de faciliter les opérations de recherche sur toutes les questions ayant trait à la santé et à la sécurité au travail. Par ailleurs, l’institut a tissé de nombreux partenariats avec des institutions et organismes nationaux et internationaux œuvrant à la promotion de la santé et la sécurité au travail.
3- Créé en 2010, l’INCVT arrive à un âge de maturité. Quel bilan faites-vous de ces douze années d’existence ?
R) La création de l’INCVT en 2010 est survenue suite aux recommandations de la commission interministérielle qui a été créée sur instructions royales après l’incendie de l’usine de Rosamor en 2008. À partir de janvier 2016, le département du travail assure la présidence du conseil d’administration de l’INCVT. Une nouvelle direction a été nommée en mai 2018 et l’Institut a pris un nouvel élan et ses activités vont être relancées à plusieurs niveaux. À ce titre, l’INCVT a élaboré une ingénierie de la formation pour les trois années à avenir, avec l’ambition de former 1.500 membres de comités de sécurité et d’hygiène à travers le Royaume au titre de 2022.
Par ailleurs, l’Institut a élaboré deux guides, un premier concernant l’évaluation des risques professionnels et un second sur l’analyse des accidents du travail au profit de 100 entreprises, qui seront accompagnées en 2022, en vue de renforcer la culture de prévention des risques professionnels. D’un autre côté, l’INCVT a mené une étude statistique pilote pour l’identification, la collecte et l’analyse des données disponibles sur les accidents du travail et les maladies professionnelles au niveau de la région de Rabat-Salé-Kenitra.
L’Institut accorde une importance capitale à la sensibilisation et à l’information dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail. A ce propos, douze journées régionales de sensibilisation sur la prévention des risques professionnels ont été organisées au profit des entreprises et des acteurs locaux, en partenariat avec le département du travail. Conformément à la stratégie du “Maroc numérique 2025”, l’INCVT veille à la digitalisation de ses activités et process, ce qui permettra un meilleur accès des usagers aux informations et aux prestations qu’il propose.